L’intelligence artificielle en traduction : état des lieux, compétences et orientations pratiques pour la formation

AI in translation: state of the art, skillset and practical guidelines for training

Diverradennoù

Les métiers de la traduction sont en première ligne pour aider à définir une approche raisonnée et responsable des technologies d’intelligence artificielle. S’inscrivant volontiers dans ce mouvement, cette contribution explore les enjeux de l’IA dans la formation des experts linguistes de demain. Elle dresse d’abord un état des lieux de ces outils en traduction professionnelle. Partant de là, il s’agit de réfléchir aux rôles émergents que les diplômés de nos formations seront appelés à jouer et aux compétences à incorporer dans leur palette. L’article insiste sur l’importance des compétences permettant à l’humain de se positionner comme la pierre angulaire de la fourniture des services de traduction professionnelle. Il s’intéresse aux modalités pratiques que pourrait prendre l’intégration de ces technologies dans la formation initiale et continue aux métiers de la traduction et partage l’expérience d’une approche expérientielle et collaborative dans l’enseignement de ces outils.

Language professions and translation in particular are on the front line in defining a reasoned and responsible approach to artificial intelligence technologies. As part of this movement, the present contribution explores the challenges of AI in the training of the language experts of tomorrow. It begins by taking stock of the current state of these tools in professional translation. From there, it considers the emerging roles that graduates of our training courses will be called upon to play, and the skills they will need to incorporate into their professional toolbox. The importance of consolidating human-specific skills as the cornerstone of professional translation service provision is emphasized. Finally, the authors look at the practical ways in which these technologies can be integrated into initial and continuing training for the translation professions, and share their experience of an experiential and collaborative approach to teaching these tools.

Menegerioù

Mots-clés

intelligence artificielle, communication interculturelle, traduction outillée, didactique de la traduction, approche basée sur les compétences

Keywords

artificial intelligence, multilingual communication, technological workflows, translation training, competence building

Steuñv

Testenn glok

Introduction

L’intelligence artificielle (IA) est partout et elle est en train d’opérer un changement profond dans notre rapport au langage en tant que société. Le « phénomène ChatGPT » est qualifié d’exceptionnel (Moyse, 2023 : 19) et non sans raison : lancé fin 2022, l’outil a attiré un million de curieux en cinq jours (Marr, 2023) et a ensuite séduit 100 millions d’utilisateurs actifs en seulement deux mois (Hu, 2023). Même si ces agents artificiels, destinés au traitement de tâches spécifiques, ne sont pas aujourd’hui comparables à l’intelligence humaine qui ne connaît pas de limite, ils « raisonnent, apprennent et interagissent avec leur environnement » (Moyse, 2023 : 38, citant Russell et Norvig, 2021) et dépassent aujourd’hui l’humain sur plusieurs critères (Perrault et Clark, 2024). En réalité, l’intelligence artificielle s’invite dans la communication humaine depuis longtemps déjà avec la traduction automatique neuronale (TAN). D’abord utilisée dans les échanges éphémères sur les réseaux sociaux, la traduction automatique brute est aujourd’hui directement intégrée aux nombreux contenus web tant commerciaux qu’institutionnels – avec plus ou moins de succès. En traduction professionnelle, la tendance est à l’industrialisation de la profession, avec des processus de plus en plus automatisés et des flux de production toujours davantage standardisés, ainsi qu’une concentration de l’activité chez les grands acteurs du secteur et les économies d’échelle résultantes (FIT-IFT, 2022). La configuration de facto en traduction pragmatique, reposant sur la modification par l’humain de la pré-traduction automatique, tend aussi à se propager dans les domaines de traduction créative auxquels elle ne se prête guère, tant les gains de productivité permis par la machine et les profits financiers résultants font rêver. À titre d’exemple, citons le projet européen EFFORT qui cherche à établir un cadre commun de référence pour la traduction et dans lequel la traduction automatique fait partie intégrante de la compétence instrumentale et méthodologique dans tous les domaines de traduction, y compris en traduction littéraire (Hurtado Albir et al., 2023). L’intégration de la machine dans les flux de traduction va de pair avec l’introduction de la notion de qualité suffisante en contexte1 ou fit-for-purpose.

Loin de rester en retrait dans cette tempête du siècle qui secoue la profession, la sphère académique mène une recherche foisonnante dont témoignent les nombreux appels à contributions, publications et thèses en cours sur l’IA en traduction. Le corpus de données résultant constituera une base solide pour intégrer ces évolutions technologiques dans les pratiques professionnelles et dans les formations aux métiers de la traduction. Le grand enjeu de la théorisation consiste à redéfinir ce rapport à l’IA dans la sphère de la communication humaine. En effet, pour conserver l’attractivité des professions langagières et renforcer la confiance professionnelle des traducteurs en formation (Deneufbourg et Balandina, 2024), une vision positive de l’avenir de nos métiers est essentielle (FIT-IFT, 2022).

Pour négocier ce pas de deux périlleux dans la danse entre l’intelligence humaine et artificielle, nous nous inscrivons volontiers dans le mouvement visant à replacer l’humain au centre du processus de prise de décision qu’est tout projet de traduction, et à conserver le plaisir de traduire et la satisfaction professionnelle d’un travail bien fait, quels que soient les outils choisis. Une telle approche raisonnée doit permettre de répondre à un certain nombre de questions : Quelles sont les utilisations de l’IA dans les flux de traduction, aujourd’hui comme demain ? Quelles compétences sont nécessaires pour l’exploiter au mieux ? Comment former les apprenants en traduction à ces nouvelles pratiques ?

Toute approche qui se veut raisonnée doit, avant tout, se fonder sur des données. Ainsi, nous commencerons par dresser un état des lieux des technologies d’intelligence artificielle dans la sphère de la traduction professionnelle et des compétences nécessaires pour exploiter au mieux ces solutions dans les flux de traduction pragmatique. Ces constats nous serviront ensuite pour réfléchir à la palette de compétences adaptée au nouveau profil des experts linguistes de demain. Nous nous pencherons, enfin, sur les modalités pratiques que pourrait prendre l’intégration de ces technologies dans la formation initiale et continue aux métiers de la traduction et partagerons notre expérience d’une approche dynamique, expérientielle et collaborative dans l’enseignement de ces outils.

Intelligence artificielle et traduction : un état des lieux

Nous examinerons, en premier lieu, les utilisations établies de l’intelligence artificielle en traduction, notamment la traduction automatique neuronale mais aussi les solutions d’IA moins visibles intégrées dans l’environnement de traduction professionnelle, ainsi que les utilisations émergentes des LLM et de l’IA générative. Après cette cartographie des usages, nous nous intéresserons à l’impact de ces outils sur le processus, le produit et le marché de la traduction. Nous nous pencherons ensuite sur les compétences définies dans la littérature comme essentielles pour intervenir dans les flux de traduction technologiques. Pour terminer, nous nous interrogerons, à partir de nos propres travaux, sur la vision qu’ont les professionnels en exercice des compétences essentielles à l’ère de l’IA.

IA dans les flux de traduction professionnelle

La traduction automatique a désormais largement fait ses preuves en traduction pragmatique, notamment depuis l’arrivée sur le marché des moteurs neuronaux qui font aujourd’hui partie intégrante de l’écosystème de la traduction professionnelle (Nimdzi Insights, 2024 : 67). Sur le marché européen, l’implantation de la traduction automatique dépasse les 70 %, tous types de prestataires de services linguistiques confondus (ELIS, 2024 : 35). Même si l’usage réel de ces outils reste pour l’instant inférieur à leur degré d’implantation, il est estimé que plus de la moitié de la traduction professionnelle se fera à l’aide des outils de TAN ou de l’IA dès 2025 (ibid. : 4). Le flux outillé articulé autour de la TAN s’est notamment imposé dans les grandes agences qui dominent le marché global des services linguistiques : en 2024, 83 des cent premiers fournisseurs de services linguistiques proposaient des services de traduction automatique et post-édition (Nimdzi Insights, 2024 : 40). L’intégration de la traduction automatique dans les flux de production se passe via l’environnement de traduction pragmatique (TAO). Dans ces environnements, la traduction automatique n’est pas seulement proposée à titre d’option : la pré-traduction automatique est généralement configurée dans le flux de travail par défaut. Au sein des interfaces de TAO, les propositions de traduction automatique constituent des ressources pour la traduction au même titre que les correspondances issues des mémoires de traduction et sont présentées de façon similaire, le pourcentage d’analogie étant remplacé par l’estimation automatique de la qualité. Ainsi, la tendance est à l’agrégation des données linguistiques, à tel point d’ailleurs que toute distinction en fonction de l’origine d’une solution de traduction donnée devient impossible.

L’IA générative et les LLM s’inscrivent dans cette continuité et s’implantent désormais dans l’environnement de travail du traducteur pragmatique sous TAO. C’est par exemple le cas des outils de TAO des éditeurs Phrase2, RWS3 et WordScope4. Dans ces environnements, l’IA intervient déjà en coulisses dans différentes opérations : frappe prédictive, assurance qualité, réparation des correspondances partielles issues de la mémoire de traduction, estimation de la qualité de traduction automatique et choix des propositions de TAN présentées à l’utilisateur… Les utilisations émergentes (Nimdzi, 2023) des LLM dans les flux de traduction sont également prometteuses, de la recherche contextuelle à la post-édition et révision semi-automatisée, en passant par l’extraction terminologique et l’alignement. Ces modèles ont ainsi le potentiel de jouer le rôle de véritables assistants pour l’humain dans le processus de traduction. En matière de traduction automatique, les LLM sont susceptibles de supplanter les modèles actuels, même si leurs performances sont pour le moment inférieures à celles de moteurs entraînés de traduction neuronale (Welocalize, 2023), notamment en raison du caractère non prédictible de leur production, de leur manque de précision et de leur propension à l’hallucination. Le potentiel de ces modèles en matière de traduction automatique tient à leur capacité à apprendre en contexte, en intégrant par exemple des glossaires et des guides stylistiques, et à suivre les instructions de l’utilisateur humain pour produire une pré-traduction automatique respectant les exigences du cahier des charges (Nimdzi Insights, 2023 : 26). Enfin, si les LLM ont un potentiel disruptif tel qu’il rend nulle toute prévision ou prédiction antérieure en matière de technologies langagières (Nimdzi Insights, 2024 : 7), c’est en grande partie en raison de leurs capacités de génération de contenu multilingue (ibid. : 17). L’IA générative peut désormais s’intégrer en amont dans les flux de production de contenu, permettant la rédaction simultanée en plusieurs langues (Welocalize, 2024) et éliminant ainsi la phase de traduction à proprement parler.

Impact de l’IA en traduction

Cette automatisation toujours plus importante des flux de travail a durablement impacté tant le processus que le produit de la traduction, apportant son lot d’avantages potentiels (gain de temps, réduction de l’effort, réduction des erreurs, clarté, objectivité, idiomaticité, etc.) et de risques (contraintes sur la créativité, pression sur le triangle délai/tarif/qualité, dépendance de l’outil, monotonie du travail, réduction de l’agentivité, etc.). La profession est en évolution constante et beaucoup de pratiquants cherchent des repères dans ce paysage mouvant.

Impact sur le processus

Au niveau du processus, tout d’abord, les gains de productivité apportés par la traduction automatique sont aujourd’hui bien établis, même si tous les auteurs soulignent des variations importantes en fonction de divers paramètres, comme la combinaison linguistique et le profil des post-éditeurs. Screen (2019) recense 20 études avec des participants professionnels menées entre 2007 et 2017, portant sur 18 combinaisons linguistiques différentes et comparant la traduction humaine à la post-édition de traduction automatique essentiellement statistique. Sur les 17 études qui rapportent des données sur la productivité, toutes font état de gains de productivité en post-édition comparativement à la traduction (Screen, 2019 : 135-136). Il en va de même pour la TA neuronale. Terribile (2024) fait une analyse comparative exhaustive d’un volume total de 90 millions de mots, données réelles produites en contexte professionnel et représentant 11 paires de langues différentes. À l’étape de production des textes, la post-édition de TAN résultait en un gain de temps moyen de 66 % par rapport à la traduction humaine (Terribile, 2024 : 141). Läubli et al. (2019) confirment les gains de temps conséquents permis par la post-édition de TAN même dans des combinaisons linguistiques moins étudiées et sans données massives d’entraînement.

Les effets négatifs sur le processus sont tout aussi établis. Dans les flux de post-édition, le traducteur qui intervient sur le texte traduit automatiquement assume le rôle du réviseur qui était, dans le flux de traduction classique, un intervenant différent. Or, la post-édition est généralement considérée comme une activité distincte de la révision, nonobstant les similitudes entre ces deux pratiques (Robert et al., 2024 : 187). Avec la généralisation de la traduction automatique et l’imposition du flux de post-édition par défaut, l’humain s’est retrouvé enfermé dans la « boucle » des flux de production de contenus multilingues, la portée de son intervention réduite à la correction des erreurs de la machine, sa vision de la situation de communication fragmentée. La post-édition est une activité monotone qui consiste en grande partie à corriger des erreurs répétées (Moorkens et O’Brien, 2017). Si la créativité en traduction naît de la recherche de solutions innovantes pour reformuler les spécificités linguistiques, culturelles et stylistiques du texte source (Aranda, 2009 : 33), les contraintes de la post-édition ne laissent guère de place à son expression. Ceci est d’autant plus vrai que la traduction automatique exerce une influence négative sur la prise de décision au cœur du processus traduisant à travers cet « effet fantôme » (Schumacher, 2023) ou priming effect dû aux propositions de la machine qui interfèrent avec la pensée. L’outil technologique contraint particulièrement le processus en traduction créative (Guerberof-Arenas et Toral, 2022).

Impact sur le produit

Pour ce qui est de l’impact des technologies d’IA sur le produit de la traduction, la littérature met généralement en évidence une potentielle influence positive de la traduction automatique sur la qualité des textes pragmatiques produits. Screen (2019) puise dans Gouadec (2010) une définition de la qualité en traduction professionnelle : le texte traduit doit être grammaticalement et stylistiquement correct et fidèle au texte source, et répondre aux besoins de l’utilisateur (Screen, 2019 : 137)5. Sur 13 études comparatives menées entre 2009 et 2017, une seule fait état d’un effet négatif de la post-édition sur la précision, et une autre sur le style (Screen, 2019 : 137). Dans son étude comparative sur un corpus professionnel volumineux de textes traduits et post-édités, Terribile (2024) n’évalue pas directement la qualité mais analyse le temps de révision, que l’on peut considérer comme un indicateur potentiel de la qualité des textes issus de ces deux flux de travail. Dans 8 des 11 combinaisons linguistiques incluses, l’analyse montre des gains de productivité à l’étape de révision des textes pré-traduits par la TAN et post-édités, avec un gain de temps global de 38 % par rapport à la révision des textes traduits (Terribile, 2024 : 142). Läubli et al. (2019) observent également une qualité égale ou légèrement meilleure des textes post-édités. Au-delà de la réduction des erreurs, la minimisation de la subjectivité et de l’interprétation propres à l’humain ainsi que la simplification du langage sont autant d’avantages potentiels des flux outillés, notamment dans certains domaines de spécialité (Martikainen, 2019).

Un impact négatif potentiel sur le produit de la traduction est l’appauvrissement de la variété lexicale et une plus grande interférence du texte source (Toral, 2019). Des erreurs spécifiques ont également été mises en évidence, notamment dans certains domaines et genres textuels qui se prêtent moins à l’intervention de la machine, à l’exemple de la traduction juridique dont les concepts résistent davantage au traitement automatique. Surtout, l’intervention de la machine a une influence globalement négative sur le produit en traduction créative. Dans le domaine littéraire, malgré un effet positif sur le paramètre de la lisibilité, l’outil technologique réduit la créativité tout comme le plaisir de lecture (Guerberof-Arenas et Toral, 2020, 2022 ; Oliver et al., 2022). De même, en traduction audiovisuelle et sous-titrage, l’intervention de la traduction automatique dégrade la qualité : les sous-titres post-édités sont plus denses, avec davantage de one-liners6 et une plus grande oralité ; des informations importantes du scénario sont omises et la cohérence réduite ; le découpage des lignes et la ponctuation comportent des erreurs (Hagström et Pedersen, 2022 : 215). L’étude de Hagström et Pedersen (2022) met en évidence une augmentation statistiquement significative des erreurs et de leur degré de gravité dans les sous-titres post-édités.

Impact sur la profession

Le secteur de la traduction professionnelle a subi de plein fouet les incertitudes que fait peser l’IA sur l’avenir des professions langagières : tant les agences que les professionnels indépendants ont dû faire face, en 2023, à une croissance négative (ELIS, 2024 : 13). La recherche de profits toujours plus conséquents et la baisse des tarifs qui s’ensuit participent de la dégradation des conditions d’exercice et amènent davantage de professionnels chevronnés à abandonner le métier (FIT-IFT, 2022). Ce n’est pas tant la technologie en soi, ni la pratique de la post-édition qui posent problème aux traducteurs, mais les conditions de travail dégradées des flux de post-édition (Dorst et al., 2023 : 57). Les professionnels indépendants sont frustrés par les pressions tarifaires et temporelles qui pèsent sur eux et par l’ignorance des donneurs d’ordre des exigences de la post-édition : ils doutent de la maîtrise technologique des chefs de projet pour juger de la pertinence d’utiliser la TA sur un projet donné (ibid.).

Si les métiers de la traduction sont les premiers impactés par ces développements, leurs représentants sont aussi les mieux placés pour aider à définir les contours d’une approche raisonnée et responsable de ces technologies. Des prises de position émanant des associations professionnelles permettent de poser les premiers jalons sur ce chemin, appelant à garantir la transparence du processus (ATLAS/ATLF, 2023) et à (re)positionner l’humain au cœur de la technologie (SFT, 2024). De l’autre côté de l’Atlantique, l’American Translators Association encourage les pratiquants à la veille technologique pour se donner les moyens de survivre à la transformation en cours du secteur de la traduction et de l’interprétation (ATA, 2023). Les initiatives se multiplient pour contrer la tendance tayloriste de l’industrie traduisante (Moorkens, 2020) qui limite l’agentivité de l’humain et enferme celui-ci dans un rôle réduit de rouage de la machine : d’aucuns appellent à « ralentir pour mieux traduire » (Hurot, 2022), d’autres s’érigent en dernier rempart de la traduction humaine, comme le collectif En chair et en os7. À travers ces initiatives se dessine une vision claire sur le bien-être de l’humain au centre du processus. On s’interroge sur l’expérience de l’utilisateur de la technologie (Briva Iglesias et al., 2023), ou encore sur la correspondance de facto du gain de temps apporté par l’outil technologique avec le gain de productivité (Taravella, 2022). Et si ce gain de temps, au lieu de s’inscrire dans la logique d’accélération des cadences et de dégradation des conditions d’exercice, avec toujours plus de volumes traités toujours plus vite et toujours à moindre coût, se traduisait plutôt par davantage de temps consacré au bien-être du traducteur, par exemple en lui faisant profiter de davantage de temps libre sans sacrifier son niveau de vie ?

Compétences humaines dans les flux outillés

Suite à l’essor technologique dû notamment à la TAN, la post-édition est désormais une pratique courante sur le marché des services linguistiques (Girletti et Lefer, 2022). Il ne faut pas, pour autant, réduire la pratique traduisante à la compétence technologique : les outils restent des satellites orbitant autour de l’objet principal qu’est la traduction. Guidère (2016 : 9) le rappelle utilement : « [l]’essentiel est que le centre d’intérêt soit la ‘traduction’ et non pas, par exemple, la ‘langue’, le ‘langage’, la ‘psychologie’, la ‘sociologie’ ou encore la ‘technologie’, même si ces aspects peuvent être importants dans le produit ou le processus de traduction. Tout est question de focalisation et de points de vue. »

Compétences dans la littérature traductologique

Développer des compétences technologiques liées à l’utilisation de la traduction automatique neuronale ou de l’IA générative est, certes, plus que jamais nécessaire pour rester compétitif sur le marché de la traduction, mais un post-éditeur est avant tout un traducteur qualifié (Nitzke et Hansen-Schirra, 2021 : 69-70), donc un expert de son domaine possédant les mêmes compétences. Seules une excellente maîtrise des langues de travail et une connaissance approfondie des cultures source et cible peuvent lui permettre de pallier les lacunes de la machine et d’apporter, de fait, une valeur ajoutée au processus (Loock, 2019). La compétence traductionnelle est, quant à elle, au cœur de la pratique et donc de la formation (Jiménez-Crespo, 2013). Elle permet aux traducteurs de mobiliser pléthore de méthodologies et de stratégies pour s’adapter aux différentes activités du métier (traduction, révision, post-édition, rédaction, etc.). Contrairement à la machine, qui ne peut ni détecter ni corriger les problèmes de traduction, l’humain peut faire appel à son esprit critique et d’analyse pour détecter et résoudre des erreurs complexes, souvent cachées. Ce sont ensuite les compétences personnelles ou interpersonnelles (soft skills) qui garantissent notamment une certaine capacité d’adaptation aux évolutions technologiques et structurelles du métier. Celles-ci « ne peuvent être acquises par la machine et représentent des aptitudes spécifiquement ‘humaines’ » (Loock, 2019 : 4). Elles portent notamment sur le développement de l’esprit critique, la capacité d’analyse ou encore la créativité pour contrebalancer les manquements des technologies. Nitzke et al. (2019) insistent également sur l’importance des compétences stratégiques et de résolution de problèmes, indispensables pour identifier et corriger les erreurs de traduction de la machine souvent invisibles à l’œil non averti.

Compétences dans la pratique traduisante

Dans le cadre d’une enquête qualitative par entretiens semi-directifs (Salmi, en cours), 17 traducteurs avec une expérience moyenne de cinq ans en post-édition ainsi que 9 chefs de projets ont été interrogés sur les compétences incontournables à l’ère de l’IA. Le tableau 1 présente les compétences les plus fréquemment mentionnées avec des exemples de verbatims pour les illustrer.

Compétences

Verbatim

Compétences du traducteur

« Être un très bon traducteur, un excellent traducteur » (participant 5 – traducteur)

« Déjà, la première chose pour moi, c’est qu’un bon post-éditeur est surtout un bon traducteur. » (participant 25 – chef de projet)

Expertise dans un ou plusieurs domaines de spécialité

« Les compétences, en fait, dans les domaines. Quand on ne connaît pas son domaine, on peut pas faire de la post-édition, pour moi c’est pas possible. » (participant 6 – traducteur)

« l’expertise du domaine, parce que le post-éditeur, il va avoir la capacité de déterminer si la traduction automatique fait une erreur ou pas, et il va pas se reposer sur ce qu’a donné la traduction automatique, il va savoir : “Ah ben là c’est pas ce terme, c’est plutôt celui-là. C’est vrai que celui-là on peut l’utiliser, mais pas dans ce contexte.” » (participant 11 – chef de projet)

Maîtrise des langues de travail

« maîtriser la langue source et la langue cible » (participante 2 – cheffe de projet)

« connaissance parfaite de sa langue » (participante 14 – traductrice)

Compétences technologiques « Oui, après sur la partie technique, technologique, c’est plus au niveau des chefs de projet, parce que c’est eux qui préparent en fait. Moi, j’interviens pas du tout là-dessus. Après je vais me servir des outils, mais c’est vrai que si on me demande dans le détail comment est alimenté leur moteur, etc., je ne sais pas trop, comme je reçois les fichiers déjà prêts. » (participante 4 – traductrice)
Compétences humaines

« Alors on ajoute à ça le fait qu’on doit toujours être un peu méfiant, de douter du texte. Donc il ne faut pas simplement traduire et mettre “Ok, ça, ça a l’air bon.” Oui, mais il faut toujours être méfiant et ça, c’est des règles de traduction, partout. Parce que les auteurs font des erreurs, les autres personnes font des erreurs, etc. » (participant 15 – traducteur)

« Avec peut-être en plus, peut-être une capacité d’analyse un peu plus aboutie pour pouvoir repérer tout de suite si un projet va poser problème ou, voilà qu’ils sont capables de se rendre compte dès le début que le projet va être exploitable ou pas. » (participante 23 – traductrice)

« Plus de concentration, d’attention, de capacités cognitives. C’est un autre schéma mental. » (participante 21 – traductrice)

Tableau 1. Enquête qualitative auprès de praticiens

Les résultats de l’enquête confirment l’importance des compétences linguistiques et traductionnelles. La majorité les participants s’accordent sur les compétences qui font le post-éditeur : celui-ci doit, avant tout, avoir une expérience solide en traduction ainsi qu’une expertise dans un ou plusieurs domaines de spécialité. Ils soulignent également l’importance de maîtriser, aujourd’hui plus que jamais, les langues de travail et notamment la langue source. Les compétences technologiques occupent également une place importante, même si la plupart des participants estiment que la maîtrise des outils dans la pratique ne suppose pas une connaissance ou une compréhension de leur fonctionnement. Enfin, l’enquête permet de réaffirmer la primauté des compétences humaines à l’ère de l’automatisation de la traduction. Par compétences humaines, on entend ici la capacité de lâcher-prise (accepter de ne pas modifier les suggestions de la TA lorsque celles-ci sont correctes, accepter de ne pas fournir une qualité de traduction humaine), l’attention aux détails, une grande capacité de concentration, l’esprit critique, la rigueur, la patience, la capacité d’analyse, la curiosité et la prise de décision rapide.

Modèle de compétences en traduction outillée

Partant des constats dressés dans la section précédente, nous envisagerons ici les compétences permettant aux experts linguistes de demain de se positionner comme la pierre angulaire sur laquelle repose la fourniture des services de traduction professionnelle. Pour ce faire, nous prendrons pour point de départ le référentiel de compétences du réseau des programmes de master européen en traduction (EMT, 2022) dont la vision est, à notre sens, encore plus pertinente à l’ère de l’intelligence artificielle. Ce référentiel reconnaît notamment que l’intelligence humaine est, plus que jamais, essentielle dans les environnements technologiques pour répondre au besoin de prestation de services linguistiques diversifiés de qualité. Plus l’IA est imbriquée dans les flux, et plus l’humain doit assurer son rôle d’expert aux commandes, sa connaissance de l’outil technologique devenant une vraie valeur ajoutée pour ses commanditaires. Nous envisagerons les cinq grands domaines de compétences du référentiel EMT qui nous semblent essentielles dans les environnements technologiques sous l’angle du processus et du produit. Nous terminerons cette section par quelques considérations sur les flux de travail en traduction pragmatique.

Compétences processus

Les compétences essentielles pour piloter les processus de production et de traduction de contenus assistés par l’IA appartiennent essentiellement à trois grands domaines de compétences du référentiel EMT : compétences personnelles et interpersonnelles, compétences de prestation de services et compétences technologiques. L’outil technologique, nonobstant ses avantages, est une contrainte sur le processus de traduction et tout l’art de la traduction pragmatique consiste à savoir mobiliser sa compétence traduisante dans les limites imposées par l’outil. Ces compétences transversales propres à l’humain sont cruciales pour mettre en place des pratiques durables dans les environnements technologiques. Elles sont fondées sur la capacité de l’humain à s’adapter aux exigences de la situation de communication, à résoudre des problèmes à travers l’application de stratégies de traduction adaptées, et à se renouveler en permanence – aptitudes qui le distinguent fondamentalement de la machine.

La plus importante d’entre elles, la capacité critique et de réflexion fait de l’humain le point focal de la prestation de services linguistiques, le seul capable de prise de décision et pouvant répondre à un cahier des charges dans le respect des exigences déontologiques. Les professionnels de la traduction seront aussi appelés à jouer auprès des clients un rôle proactif d’expert consultant en matière de technologies linguistiques, ce qui suppose de renforcer les soft skills, ou les compétences interpersonnelles, et notamment les compétences de communication pour la gestion du processus avec toutes les parties prenantes, donneurs d’ordre et collègues. Endosser ce rôle de consultant en technologies suppose aussi de comprendre les enjeux sociétaux, économiques et écologiques des outils d’IA pour sensibiliser les donneurs d’ordre à ces risques. Les modèles avancés sont toujours plus gourmands en ressources et leurs coûts d’entraînement atteignent des sommets8, tout comme leur empreinte carbone. La propriété intellectuelle et la confidentialité des données sont d’autres sujets d’importance sur lesquels seule une prise de recul critique permet de porter un regard avisé. Le réseautage métier sera une compétence interpersonnelle essentielle pour impulser davantage de collaboration entre traducteurs, prestataires de services, donneurs d’ordre et ingénieurs linguistiques. Parmi les compétences personnelles, la capacité de s’adapter et d’apprendre à apprendre seront essentielles pour la formation tout au long de la vie et pour la veille technologique, tout comme la capacité de recherche le sera pour l’évaluation critique de nouvelles technologies et leur intégration dans la boîte à outils du traducteur pragmatique. Pour se démarquer, il importe de savoir vendre son expertise, d’où la nécessité de renforcer les self-marketing skills.

Le renforcement des compétences technologiques devra permettre aux experts humains de maîtriser l’ensemble du processus sous TAO intégrant diverses solutions d’intelligence artificielle. Pour ce faire, il importe de « comprendre le fonctionnement technique de ces machines pour en rester les maîtres et non en devenir les esclaves » (Moyse, 2023 : 23). Comprendre le fonctionnement de l’IA permet de comprendre aussi que la machine est destinée à reproduire les formules les plus fréquemment usitées. Le langage résultant est certes idiomatique mais lisse et normé, sans saveur ni parfum, et la créativité de l’IA se limite aux hallucinations occasionnelles. En effet, quelle que soit la définition adoptée pour la créativité, son essence est la nouveauté, tandis que les LLM sont, au fond, des « machines à prédire » la suite la plus probable (Nimdzi, 2023 : 29). La compétence technologique permettra d’employer ces outils à bon escient pour améliorer l’idiomaticité des textes grâce à l’immense corpus sur lequel s’appuie l’IA, mais aussi de les éviter pour traiter des contenus pensés par et pour l’humain dont la transmission fait appel à toute la créativité et l’originalité propres à l’humain. Comprendre que les modèles de langue visent avant tout l’idiomaticité permet de comprendre la propension de la machine à l’omission, à la fausse information et à l’hallucination (McClure, 2024) et de rester vigilant vis-à-vis de sa production, souvent bluffante de fluidité.

Les compétences technologiques doivent, enfin, intégrer les rôles émergents en ingénierie linguistique, comme la gestion des données langagières ou data curation, clé de voûte des technologies d’IA. La performance des LLM est fonction des données d’entraînement dont la collecte, la validation et l’annotation demandent un haut niveau d’expertise (Nimdzi, 2024 : 63) et les leaders sur le marché des services linguistiques répondent à ces nouveaux besoins avec des services dédiés9,10. L’interaction avec l’IA passe par les invites qui lui sont adressées, ce qui fait de la rédaction de requêtes ou prompt engineering l’interface de communication essentielle entre notre intelligence humaine et l’intelligence artificielle11. L’exploitation efficace de l’IA générative à titre d’assistant à différentes étapes du processus de traduction, de la compréhension à la reformulation en passant par la recherche documentaire, dépend des requêtes qui lui sont adressées. La pertinence de celles-ci peut être améliorée en appliquant certains principes, par exemple : bien définir les objectifs, préciser le contexte et les attentes vis-à-vis de l’IA, délimiter le rendu en termes de volume12. Sans oublier la politesse élémentaire, dont le manque peut avoir un impact négatif sur les résultats obtenus (Yin et al., 2024).

Compétences produit

Au-delà du rôle que l’humain doit assurer dans le processus, il est également nécessaire de consolider certaines compétences spécifiques pour garantir la qualité des textes issus du processus assisté par IA. Ces compétences appartiennent essentiellement à deux grands domaines de compétences du référentiel EMT : compétences en langue et culture et compétences de traduction. La compétence traduisante englobe tant le bagage culturel des aires linguistiques impliquées que la connaissance spécialisée du domaine traité, mais aussi la capacité de compréhension et d’analyse allant au-delà des mots et tout ce qui fait la richesse et l’expressivité de la communication humaine : la créativité, l’émotion, l’humour… Le travail dans un flux outillé enrichi d’intelligence artificielle implique tout particulièrement d’en consolider deux aspects : la maîtrise de la langue source et les capacités rédactionnelles en langue cible (Salmi, en cours). La compétence linguistique et culturelle en langue source fait partie des compétences essentielles pour travailler avec l’IA. Non seulement l’expérience acquise avec la traduction automatique montre que l’intervention de la machine interfère avec l’interprétation du texte source (Čulo et al., 2014), mais l’intelligence artificielle dépasserait déjà les capacités de compréhension de l’anglais de l’humain (Perrault et Clark, 2024). De même, la compétence rédactionnelle fait partie intégrante de la compétence linguistique en langue cible, et doit être renforcée pour tirer bénéfice de l’IA dans un flux outillé. L’importance de la compétence rédactionnelle rapproche les profils de compétences en traduction et en rédaction technique et rattache la compétence traduisante aux nouvelles compétences métier : la compétence rédactionnelle est mobilisée tant dans la post-édition de traduction automatique que dans la révision des textes directement produits en langue cible par l’IA générative.

Flux de traduction pragmatique

Quelques considérations s’imposent sur le flux de travail qui permettrait à l’humain d’exercer au mieux son discernement dans les environnements technologiques, indispensable pour tirer bénéfice des apports de la machine et pallier ses lacunes. Il serait notamment utile de faire la distinction entre projets de post-édition pure et projets de traduction outillée. Dans les flux de post-édition, la pré-traduction automatique est remplie par défaut dans les segments cible et doit être exploitée autant que possible. Dans cette configuration, il serait pertinent de réviser d’abord le texte cible pré-traduit pour mieux repérer et corriger les problèmes de langue (lisibilité), avant de vérifier le sens (précision) vis-à-vis du texte source (cf. Volkart et al., 2022). Le flux de traduction outillée, dans lequel les propositions de TA sont à disposition du traducteur au même titre que les correspondances issues de la mémoire de traduction ou les entrées de la base terminologique, est une configuration plus dynamique dans laquelle le traducteur reste maître de ses outils. C’est pourquoi le flux outillé enrichi de la TA est davantage plébiscité par les traducteurs (Dorst et al., 2022 : 57). La mise en place d’un tel flux suppose de pouvoir changer la configuration par défaut de beaucoup d’interfaces de TAO, où la TA est propagée directement dans les segments cible dès la phase de pré-traduction ou au moment d’entrer dans un nouveau segment, et de pouvoir distinguer les ressources linguistiques proposées selon leur origine. Cela suppose aussi une volonté de changer les flux de travail des LSP qui, souvent, font collaborer les traducteurs externes directement dans le système en ligne sans qu’ils puissent accéder au texte source ou aux ressources de traduction dans leur totalité. Enfin, indépendamment de la façon dont la TA s’intègre dans le flux de travail, le respect de certaines bonnes pratiques nous semble essentiel : travail dans l’environnement de TAO habituel ; en amont, découverte du texte source en dehors de la TAO pour interprétation et, en aval, relecture finale en-dehors de la TAO pour cohérence ; révision du texte par un intervenant distinct.

Acquisition des compétences dans la formation

Nous présenterons dans cette dernière section des exemples concrets d’exercices pour la formation initiale et continue visant l’acquisition des compétences essentielles. Notre approche s’articule autour d’activités dynamiques, expérientielles et collaboratives visant à démystifier les outils d’intelligence artificielle et à en comprendre le fonctionnement (Moyse, 2023 : 23). Les exercices sont conçus pour être facilement adaptés à différents contextes d’apprentissage.

Formation initiale

Pour chercher à combler le fossé qui semble parfois séparer les compétences acquises à l’université des réalités du marché, il est important de mettre en place en formation initiale des exercices dynamiques qui permettent d’adopter les nouveaux outils dans les formations au fur et à mesure de leur apparition sur le marché et de rester ainsi en parallèle des évolutions du marché et des métiers. Autant que possible, ces exercices sont expérientiels afin de fonder l’apprentissage sur la prise en main des outils et technologies par les apprenants eux-mêmes et de consolider ainsi leurs capacités d’adaptation et d’apprentissage, d’analyse critique et de recherche. Pour améliorer les compétences interpersonnelles des apprenants et permettre l’apprentissage par les pairs, la collaboration est encouragée dans le cadre des activités.

Cycle d’apprentissage co-construit

Afin de sensibiliser les apprenants aux avantages et risques des flux outillés et des textes produits en collaboration avec l’IA, on peut mettre en place un cycle d’apprentissage co-construit qui s’articule autour d’une analyse comparative de la productivité et de la qualité et permet également de consolider les compétences analytiques et interpersonnelles. Cet exercice a été reconduit plusieurs années de suite dans différents cursus de master 2, d’abord au sein du programme ILTS13 de l’Université Paris Cité et ensuite dans le master TEET14 de l’ESIT (Université Sorbonne Nouvelle), en appliquant différents paramètres (ex. domaines de spécialité, textes support).

Le premier exercice du cycle est individuel et consiste à produire un texte en utilisant un flux défini – par exemple, traduire ou post-éditer – et à répondre à un questionnaire sur la tâche (temps passé, difficulté ressentie). Les réponses au questionnaire permettent à l’enseignant de produire de premières statistiques sur la productivité respective des flux comparés (Figure 1) et les difficultés spécifiques à chacun.

Figure 1. Productivité moyenne

Figure 1. Productivité moyenne

Les textes produits par les apprenants, une fois anonymisés, constituent le corpus à analyser dans l’exercice suivant du cycle. Par petits groupes, les apprenants soumettent les textes à diverses analyses : annotation manuelle d’erreurs (Figure 2), attribution de scores d’évaluation (Figure 3), obtention de statistiques textuelles automatiques (par exemple : longueur moyenne des phrases, indice de lisibilité). À nouveau, les résultats de l’ensemble des participants sont ensuite agrégés par l’enseignant pour produire des statistiques et les illustrer avec des graphiques.

Figure 2. Annotation manuelle d’erreurs

Figure 2. Annotation manuelle d’erreurs

Figure 3. Attribution de scores d’évaluation

Figure 3. Attribution de scores d’évaluation

Pour conclure le cycle, il est important de partager ces visualisations des résultats agrégés avec les apprenants pour faire ensemble le bilan de l’expérience et permettre aux apprenants d’échanger sur l’expérience et ses résultats et d’exprimer leurs doutes ou interrogations éventuelles. Lors de ce bilan, les conclusions tirées peuvent utilement être comparées à la littérature traductologique existante sur le sujet.

Le grand avantage de ce cycle d’exercices est qu’il est modulable à l’infini : en fonction des objectifs, il peut être réalisé en début ou en fin de parcours ; la comparaison peut porter sur différents flux de production (par exemple, traduction vs post-édition ; post-édition de la TAN vs post-édition de l’IA générative) ; les résultats obtenus sont différents en fonction du domaine de spécialité et du texte choisi. De plus, le cycle d’exercices peut intégrer des étapes additionnelles pour travailler sur différentes compétences selon les besoins. Pour consolider les compétences technologiques et décisionnelles, on peut ajouter une étape de comparaison et de choix d’outils ou de flux de traduction. Pour renforcer les compétences de prestation de services, on peut intégrer au cycle un exercice consistant à calculer le tarif selon les différentes modalités appliquées (cf. Girletti et Lefer, 2022), ou à examiner les conditions générales d’utilisation (CGU) des outils utilisés en accordant une importance particulière à la confidentialité des données.

Formation continue

L’offre de formation continue actuelle porte principalement sur la traduction automatique et/ou la post-édition. Il existe aujourd’hui une dizaine de formations disponibles sur les marchés francophone et anglophone, organisées pour la plupart en ligne sous forme synchrone ou asynchrone et dispensées par des traducteurs indépendants, des éditeurs de logiciels (RWS) ou par des organismes institutionnels ou professionnels (Société française des traducteurs ou SFT, université de Genève, université de Surrey, etc.). L’analyse de ces programmes de formation montre que toutes présentent une partie théorique relativement importante et rares sont celles qui incluent une partie pratique à travers des exercices de post-édition annotés ou corrigés par la suite. Or, en formation continue, les attentes des apprenants diffèrent de celles des apprenants en formation initiale. Pour le traducteur professionnel indépendant, s’engager dans une formation continue représente un investissement financier et temporel en contrepartie duquel il s’attend à apprendre des techniques directement applicables dans sa pratique. Il est donc important de proposer en formation continue des contenus orientés vers la pratique et de construire les apprentissages sur les compétences existantes des apprenants.

Exercice terminologique

L’exercice décrit ici a été testé une première fois lors d’un atelier professionnel d’initiation à l’IA organisé lors de la Journée mondiale de la traduction à l’ESIT (Université Sorbonne Nouvelle) en septembre 2024. L’objectif est de s’appuyer sur les compétences métier des participants, notamment leurs connaissances du domaine de spécialité et de la terminologie du donneur d’ordre, pour exploiter efficacement l’IA dans l’extraction terminologique et la recherche d’équivalents terminologiques en langue cible. Idéalement, cet exercice sera donc mené sur les supports apportés par les participants, par exemple des textes traduits par leurs soins. Pour les besoins de l’atelier, nous avons sélectionné un extrait (environ 700 mots) d’un texte technique en accès libre traitant de la gestion des données et des accès dans les entreprises. Dans un premier temps, il a été demandé à ChatGPT d’extraire toute la terminologie technique du texte sans autre instruction, à l’aide de la requête suivante :

Tu es traducteur spécialisé dans la traduction technique et informatique et tu dois traduire un texte pour un client spécialisé dans la gestion des identités et des accès. Tu dois extraire la terminologie avant de réaliser la traduction. Peux-tu extraire la terminologie technique et proposer une traduction sous forme de tableau de deux colonnes, une colonne en-US et une colonne fr-FR. Peux-tu générer ce glossaire dans un fichier Excel ? Le texte est en pièce jointe.

ChatGPT a bien respecté les consignes et a généré un glossaire au format Excel contenant 20 termes (tableau 2).

en-US

fr-FR

identity security sécurité des identités
digital identity identité numérique
cybersecurity attacks attaques de cybersécurité
SaaS solution Solution SaaS
AI-driven risk assessment évaluation des risques basée par l’IA
Identity journey Parcours d’identité
identity governance gouvernance des identités
identity and access management (IAM) gestion des identités et des accès (IAM)
cloud infrastructure infrastructure cloud
self-service access requests demandes d’accès en libre-service
identity security programs programmes de sécurité des identités
risk exposure exposition au risque
user access certifications certifications d’accès utilisateur
identity maturity maturité des identités
identity capabilities capacités d’identité
universal ID ID universel
dynamic trust models modèles de confiance dynamique
integrated identity programs programmes d’identité intégrés
next-gen technology innovations innovations technologiques de nouvelle génération
identity lifecycle management gestion du cycle de vie des identités

Tableau 2. Extraction et traduction de la terminologie

Cependant, ce premier tableau contient quelques mauvaises traductions qui ne correspondent pas à la terminologie du client. Pour y remédier, les participants ont, dans un second temps, fourni à ChatGPT un site de référence pour qu’il adapte les équivalences proposées en fonction de celui-ci. La requête utilisée était la suivante :

Voici le site du client : sailpoint.com. Peux-tu corriger le glossaire en t’appuyant sur la terminologie définie sur le site du client ? Peux-tu ajouter une colonne au glossaire dans laquelle tu indiqueras les termes modifiés ?

Les entrées qui ont été modifiées en réponse à cette seconde requête sont indiquées dans le tableau 3. Les équivalences terminologiques proposées ont effectivement été corrigées en fonction du site de référence. Le glossaire contient cependant encore quelques coquilles à corriger notamment pour respecter le format convenu : termes présentés par ordre alphabétique et au singulier. Pour terminer, les participants à l’atelier ont donc fourni ces règles à ChatGPT pour corriger les entrées non conformes.

en-US

fr-FR

Terme modifié

AI-driven risk assessment évaluation des risques basée par l’IA évaluation des risques pilotée par l’IA
Identity journey Parcours d’identité parcours de la sécurité des identités
identity governance gouvernance des identités gestion des identités
identity capabilities capacités d’identité capacités des identités
universal ID ID universel Identité universelle
integrated identity programs programmes d’identité intégrés programmes intégrés de gestion des identités

Tableau 3. Correction des équivalences avec référence

Quelles conclusions peut-on tirer de cet exercice ? ChatGPT a indéniablement facilité le travail d’extraction terminologique et a su s’adapter aux consignes fournies. Cependant, il faut noter qu’il n’a extrait qu’une vingtaine de termes, alors que la consigne initiale était d’extraire « toute la terminologie technique ». Ainsi, des termes importants pour ce client ont été omis. Préciser un nombre défini de termes à extraire pour mieux cadrer le travail de l’outil aurait permis de remédier à ce problème. Par ailleurs, l’évaluation de la pertinence des traductions proposées aurait sans doute posé des difficultés à un œil non averti. L’intervention d’un professionnel qualifié et expérimenté est donc nécessaire pour valider les propositions de l’outil. ChatGPT se révèle ainsi être un excellent outil pour donner une base de travail pour l’utilisateur, mais la méfiance est, là aussi, de rigueur. Tout comme pour la post-édition, le résultat généré par l’outil doit être vérifié par un traducteur ou terminologue humain expérimenté.

Conclusion

Nous avons vu que les technologies d’intelligence artificielle, si avancées soient-elles, perdent leur utilité sans l’usager-expert à l’œil critique, en particulier dans le contexte de la traduction de textes hautement spécialisés. En revanche, ces outils ont le potentiel de jouer à la perfection le rôle d’assistant pour aider à la réalisation de certaines tâches, lorsqu’ils sont mis à profit par un utilisateur humain averti, expert en communication multilingue et en médiation interculturelle. Ces technologies peuvent paraître, au premier abord, complexes ou donner l’impression de perdre du temps, mais il faut s’armer de patience. Comme pour toute nouveauté, il existe une courbe d’apprentissage et, avec le temps et la maîtrise, ces technologies peuvent contribuer à améliorer la productivité des professionnels et à « sortir l’humain de la boucle ». En effet, si le potentiel de l’IA générative se réalise et débouche sur un changement de paradigme en traduction pragmatique et en rédaction technique, les traducteurs pourraient se repositionner plus en amont dans les flux de production pour assumer le rôle d’experts en communication multilingue. Cela suppose d’engager une réflexion sur le rapport à l’outil et sur ce parallèle, à notre sens erroné, qui s’est imposé dans les esprits entre traduction automatique et humaine. Plutôt que d’entraîner des algorithmes à toujours mieux imiter l’humain ou à « humaniser » la production de la machine, nous appelons à reconnaître à sa juste valeur l’expertise de l’humain utilisateur de la technologie et à placer l’expérience utilisateur au cœur de la réflexion sur les outils d’IA à développer. Ainsi, au-delà de la réflexion à mener sur les compétences propres à l’agent humain, il est important de s’interroger aussi sur le rôle de l’intelligence artificielle dans ce partenariat Homme-Machine : quelles capacités émergentes permettraient d’en faire un assistant véritablement utile en traduction professionnelle ? Pour tirer pleinement bénéfice de l’intelligence artificielle dans la pratique professionnelle de la traduction et dans la formation, il serait utile d’explorer des collaborations avec des développeurs pour imaginer des solutions technologiques adaptées à la traduction professionnelle. À titre d’exemple, on peut citer la traduction interactive ou adaptative en temps réel, ou la possibilité de paramétrer l’IA assistante pour des tâches spécifiques comme la recherche terminologique d’équivalents attestés. Le renforcement des liens entre les différents acteurs du secteur à travers de tels partenariats serait sans doute bénéfique pour peser collectivement dans le débat sociétal sur la place de l’humain dans un monde technologique.

1 « Can justify the decisions made to produce communicatively adequate translations of literary texts, including revision and post-editing decisions

2 https://phrase.com/platform/ai/

3 https://www.trados.com/fr/product/discover/AI-translation/

4 https://docs.wordscope.com/en/articles/key-benefits-of-having-chatgpt-integrated-into-wordscope/

5 La clarté et la précision sont des critères intrinsèques, la visée de communication est extrinsèque.

6 Sous-titre d’une seule ligne, cf. par exemple : https://subtle-subtitlers.org.uk/glossary-of-avt-terms/.

7 https://enchairetenos.org/

8 Coût estimé pour l’entraînement du modèle GPT-4 d’OpenAI : l’équivalent de 78 millions de dollars américains (Perrault et Clark, 2024).

9 https://www.rws.com/artificial-intelligence/train-ai-data-services/ai-data-consulting/

10 https://www.lionbridge.com/ai-training/

11Prompt engineering is the art of communicating with a generative large language model”, ChatGPT, cité dans Bsharat et al. (2023).

12 Cf. par exemple https://platform.openai.com/docs/guides/prompt-engineering. Se reporter à Bsharat et al. (2023), pour un ensemble de principes de

13 Industrie de la langue et traduction spécialisée

14 Traduction éditoriale, économique et technique

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Volkart Lise, Girletti Sabrina, Gerlach Johanna, Mutal Jonathan David, Bouillon Pierrette, 2022, « Source or target first? Comparison of two post-editing strategies with translation students », Vers une robotique du traduire, Journal of Data Mining & Digital Humanities (II Pedagogical practices), [ttps://doi.org/10.46298/jdmdh.9067].

Welocalize, 2024, « 6 Predictions for 2024 : Will Generative AI Go Mainstream ? », Welocalize, 3 janvier, [https://www.welocalize.com/insights/6-predictions-for-2024-will-generative-ai-go-mainstream/], consulté le 16 juin 2024.

Welocalize, 2023, « Do LLMs or MT Engines Perform Translation Better ? », Welocalize, 2 août, [https://www.welocalize.com/insights/do-llms-or-mt-engines-perform-translation-better/], consulté le 16 juin 2024.

Yin Ziqi, Wang Hao, Horio Kaito, Kawahara Daisuke, Sekine Satoshi, 2024, « Should We Respect LLMs? A Cross-Lingual Study on the Influence of Prompt Politeness on LLM Performance », arXiv preprint, [https://doi.org/10.48550/arXiv.2402.14531].

Notennoù

1 « Can justify the decisions made to produce communicatively adequate translations of literary texts, including revision and post-editing decisions where relevant. »

2 https://phrase.com/platform/ai/

3 https://www.trados.com/fr/product/discover/AI-translation/

4 https://docs.wordscope.com/en/articles/key-benefits-of-having-chatgpt-integrated-into-wordscope/

5 La clarté et la précision sont des critères intrinsèques, la visée de communication est extrinsèque.

6 Sous-titre d’une seule ligne, cf. par exemple : https://subtle-subtitlers.org.uk/glossary-of-avt-terms/.

7 https://enchairetenos.org/

8 Coût estimé pour l’entraînement du modèle GPT-4 d’OpenAI : l’équivalent de 78 millions de dollars américains (Perrault et Clark, 2024).

9 https://www.rws.com/artificial-intelligence/train-ai-data-services/ai-data-consulting/

10 https://www.lionbridge.com/ai-training/

11Prompt engineering is the art of communicating with a generative large language model”, ChatGPT, cité dans Bsharat et al. (2023).

12 Cf. par exemple https://platform.openai.com/docs/guides/prompt-engineering. Se reporter à Bsharat et al. (2023), pour un ensemble de principes de rédaction de requêtes.

13 Industrie de la langue et traduction spécialisée

14 Traduction éditoriale, économique et technique

Skeudennoù

Figure 1. Productivité moyenne

Figure 2. Annotation manuelle d’erreurs

Figure 3. Attribution de scores d’évaluation

Menegiñ ar pennad-mañ

Dave elektronek

Hanna Martikainen ha(g) Sara Salmi, « L’intelligence artificielle en traduction : état des lieux, compétences et orientations pratiques pour la formation », À tradire [Enlinenn], 3 | 2024, lakaet enlinenn : 22 avril 2025, bet gweladennet : 26 avril 2025. URL : https://atradire.pergola-publications.fr/index.php?id=536 ; DOI : https://dx.doi.org/10.56078/atradire.536

Oberourien

Hanna Martikainen

École supérieure d’interprètes et de traducteurs (ESIT), Université Sorbonne Nouvelle

Hanna Martikainen est maîtresse de conférences à l’École supérieure d’interprètes et de traducteurs (ESIT). Elle y enseigne une approche outillée de la traduction spécialisée auprès des étudiant·es du Master professionnel et y anime également un séminaire de Master recherche sur les nouveaux enjeux en traductologie. Ses recherches portent sur l’impact des outils (TAO, TA, corpus, IA) sur le produit et le processus de la traduction, et plus spécifiquement sur la place des technologies dans les flux de traduction spécialisée et dans les formations en traduction.

Sara Salmi

École supérieure d’interprètes et de traducteurs (ESIT), Université Sorbonne Nouvelle

Sara Salmi est traductrice spécialisée dans la traduction technique et marketing et doctorante en traductologie à l’École supérieure d’interprètes et de traducteurs (ESIT – Université Sorbonne Nouvelle). Sa pratique de la post-édition dans le cadre professionnel l’a poussée à s’intéresser à l’utilisation de la traduction automatique par les traductaires et à son impact sur leur travail et leur bien-être. Son sujet de thèse porte sur les compétences mobilisées lors de la post-édition et sur la formation continue des traductaires.

Gwirioù oberour

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